Rencontre avec Lucinda Treutenaere

Lauréate du prix ATAA de l’adaptation en sous-titrage d’un film anglophone

Crédit photo : Rémi Poulverel

Bravo pour l’adaptation de Fisherman’s Friends ! Lors de la cérémonie, le public a pu mesurer à vos cris de joie, l’importance que ce Prix ATAA représente pour vous.

C'était une soirée incroyable ! À l’annonce de nos Prix, Emmanuel Menouna Ekani, Éléonore Boudault et moi-même avons littéralement explosé de joie. Ce moment a tellement été chargé en émotions que j'ai eu du mal à m'en remettre. J’étais comme sortie de mon corps. Je n'aurais jamais imaginé remporter ce Prix. Ma nomination me suffisait : c’était déjà une reconnaissance incroyable. Heureusement que Céline Merlin, la responsable de notre service à Titrafilm, m'avait suggéré de préparer un discours. « On ne sait jamais… », disait-elle. Quel précieux conseil ! Sinon, j'aurais été totalement incapable de dire quoi que ce soit sur scène.

Rencontre avec Emmanuel Menouna Ekani

Lauréat du prix ATAA de l’adaptation en sous-titrage d’un film anglophone

Crédit photo : Rémi Poulverel

Dans quel contexte vous a-t-on confié les sous-titres de Space Jam : Nouvelle ère, film pour lequel vous avez reçu un Prix ATAA ?

À 15 ans, j’avais adoré le film original Space Jam avec le mythique Michael Jordan. Ce premier opus avait été un succès. Dès connaissance de la sortie de Space Jam : Nouvelle ère, mon collègue Bob Yangasa – auteur du doublage – et moi-même avons exprimé notre intérêt pour ce projet à la Warner, et envoyé un email pour expliquer notre motivation et démontrer que nous serions la dream team pour cette adaptation. Et nous avons été choisis !

Sur le papier, ce film semblait enthousiasmant. Il rassemblait les mêmes ingrédients que le premier film : des personnages de dessins animés jouant au basket dans un monde fantastique avec la star actuelle du basket LeBron James, un mélange d'animation et de prises de vue réelles, et des séquences comiques. Malgré les critiques mitigées, le film a rempli son rôle de divertissement familial. À titre personnel, je me suis amusé sur ce projet, tout comme mon collègue Bob. C'est toujours gratifiant de contribuer à la traduction de films, même si ce ne sont pas toujours des chefs-d'œuvre cinématographiques. Quoi qu’il en soit, nous croyons tous les deux en l'importance de tenter notre chance et de saisir les opportunités qui se présentent.

Rencontre avec Éléonore Boudault

Lauréate du Prix de l’adaptation en sous-titrage d’un film non anglophone

Éléonore Boudault et ses colauréats de l'adaptation en sous-titrage, Lucinda Treutenaere et Emmanuel Menouna Ekani

Vous avez reçu un Prix ATAA pour l’adaptation en sous-titrage d’un film argentin, alors que vous n’avez que trois ans d’expérience dans l’adaptation. Cela doit être très valorisant ?

Oui, j’étais tellement contente ! D’autant que j'ai adoré travailler sur Le Braquage du siècle. Ce film est non seulement drôle, mais aussi admirablement réalisé et écrit. Sans vouloir minimiser mon travail, on peut dire que des dialogues amusants, rythmés et fluides facilitent grandement le processus de traduction. Lorsque tout coule naturellement, on peut se laisser porter par le film, ce qui rend le travail plus agréable et plus efficace. Or, ce n’est pas toujours le cas… Par exemple, l’anglais peut poser des défis que je ne retrouve pas en espagnol ou en portugais. La plasticité de l’anglais nous confronte parfois à des inventions de verbes – créés à partir de substantifs –, à des raccourcis ou à des pirouettes linguistiques difficiles à traduire en français car notre langue se veut précise et nette. Dans ces cas, nous devons clarifier les choses et aller droit au but.

Crédit photo : Rémi Poulverel

Rencontre avec Sabine de Andria

Membre du comité d’organisation des Prix ATAA

Autrice de sous-titres

Sabine de Andria, lors de la cérémonie 2023

Dans quel contexte les prix ATAA ont-ils été créés ? Qu'est-ce qui a motivé leur création ?

L'ATAA a été créée en 2006. Très rapidement, nous avons eu l'idée d’organiser un événement qui donnerait de la visibilité à l'association. Notre objectif principal était de faire connaître nos métiers et d'exister auprès de la presse, des institutions, de nos partenaires et de nos clients. Nous voulions sortir de l'ombre les auteurs de doublage, de sous-titrage et de voice-over ; montrer que c'était un métier à part entière et prouver que nous exercions tous le même métier, celui d'adaptateur, même si nous travaillions dans des univers différents et dans des conditions différentes.

Le deuxième objectif était d'établir une communication directe entre les auteurs et leurs clients finaux. Nous voulions encourager un dialogue ouvert – l'une des principales missions de l'ATAA – avec les commanditaires, les institutions, etc. Le fait que la cérémonie des Prix se déroule à la Sacem et celle des Prix documentaires à la Scam a par exemple, contribué à cette visibilité et permis de faire entendre la voix des adaptateurs.

Enfin, comme l'a souligné Anaïs Duchet, qui était alors présidente de l’association, nous espérions aussi rassembler toute la profession dans un esprit positif lors d’un événement festif. Une manière de faire exister l’ATAA dans un contexte autre que l’action revendicative ; et d’encourager les bonnes pratiques en mettant en lumière des adaptations de qualité ainsi que leurs auteurs.

Rencontre avec Florian Etcheverry

Membre du jury de l’adaptation en sous-titrage 2023

Lori Rault, Cécile Denise, Rachèl Guillarme, Quentin Rambaud, Florian Etcheverry et Florence Curet pour le jury, Emmanuel Menouna Ekani, Lucinda Treutenaere et Éléonore Boudault pour les lauréat·es

Vous êtes critique de cinéma indépendant pour Les Écrans terribles. Comment s’est déroulé votre travail de juré pour les Prix ATAA ?

Au sein du jury, j'étais le seul professionnel non spécialisé dans le domaine du sous-titrage. Aussi, mon rôle s’apparentait à celui d'un consultant : je portais davantage attention à la qualité de la restitution et à l’expérience artistique qu'aux critères techniques, qui étaient discutés par les autres membres du jury. Dans ce domaine, je leur faisais entièrement confiance. De mon côté, j’ai apporté mon expertise et ma sensibilité. Je regarde énormément de films et de séries en VOST, et même si je parle couramment anglais, j'accorde une grande importance à la qualité des sous-titres. Ils sont essentiels à la restitution d’un programme. Mais leur qualité ne va pas de soi, souvent j’observe que les sous-titres me font sortir de l'histoire...

Retour en images sur la Soirée des prix cinéma 2023

Vous les attendiez avec impatience, voici les photos de la soirée qui s'est tenue le 2 juin à la Sacem !

Commençons avec l'ambiance dans l'auditorium

Interview de Françoise Monier

Lauréate du Prix de l'adaptation en doublage pour le film Licorice Pizza de Paul Thomas Anderson

Crédit photo : Rémi Poulverel

Depuis vos débuts il y a 30 ans, vous avez traduit les plus grands réalisateurs. Avec un tel parcours, les distributeurs et les labos vous déroulent-ils le tapis rouge ?

De façon surprenante, je n'ai pas l'impression d'être privilégiée. Mon seul avantage est de pouvoir refuser les projets trop mal rémunérés ou inintéressants de mon point de vue. Mais on ne peut pas vraiment parler de « tapis rouge », car c'est un secteur très concurrentiel. D’autant que je ne travaille pas sur les blockbusters. Mes goûts cinématographiques m’orientent plutôt vers les films d'auteur et les films d'art et d'essai. Aujourd’hui, je dois encore « lutter » pour qu’on me confie des projets. Cependant, il est arrivé que l’on vienne me chercher. Sachant que j’avais déjà traduit plusieurs films de Spike Lee, Netflix m’a sollicitée pour sous-titrer Da 5 Bloods : Frères de sang diffusé en exclusivité sur leur plateforme. Sans discuter, ils ont accepté un tarif de 5 dollars par sous-titre, mais cela demeure notre seule collaboration. Je sais qu’il y a une véritable disparité entre les films de prestige et le reste des programmes, et que même les plateformes fonctionnent à deux vitesses. Néanmoins, ma situation m’offre la liberté de dire « non » quand je le souhaite : c’est un vrai privilège.

Retour sur la soirée de cérémonie des Prix de l'ATAA

Vendredi 2 juin s’est déroulée l'annuelle cérémonie de remise des Prix de l’ATAA. Cet événement, à la fois festif et joyeux, a également été l’occasion d’un bilan.

Cette année, force est de constater que l’association a bien grandi. La toute jeune pousse plantée il y a 17 ans est devenue un pilier de la profession ! Rassemblant environ un tiers des traducteurs et traductrices de l’audiovisuel – qui peut prétendre à plus grande représentativité ? – l’ATAA est désormais un interlocuteur incontournable des acteurs du secteur. Un dialogue qui se veut toujours ouvert, comme en 2022 lors des renégociations de rémunération en doublage dont les victoires prouvent encore (si c'était nécessaire) l’intérêt d’être unis.

Critères de sélection Prix ATAA

Il est sans doute temps, à une semaine de la remise des Prix ATAA 2023,
de rappeler les critères de sélection des adaptations soumises aux jurys.

Pour en savoir plus, règlement disponible ici.

Prix 2023 de la traduction de documentaires audiovisuels : 6e édition

Les candidatures sont ouvertes !

Ce prix, organisé en partenariat avec la Scam, braque le projecteur sur ceux et celles qui, par leur travail, rendent accessibles les programmes étrangers au public français : les traducteurs et traductrices de l’audiovisuel et, plus particulièrement, de documentaires.

Chaque édition du Prix nous convainc un peu plus de son utilité multiple : non seulement c’est l’occasion de distinguer le travail remarquable d’un auteur ou d’une autrice, mais c’est aussi l’occasion, avec la cérémonie qui suit, d’échanger entre collègues et avec nos clients sur les sujets qui nous rassemblent. Le Prix nous permet aussi de mettre à l’honneur la technique du voice-over, plus retorse qu’on ne le croit, ainsi que le sous-titrage de documentaire (tant d’informations à faire tenir dans un si petit sous-titre !)

Et pour participer ?

Vérifiez que votre candidature répond aux critères du Prix en consultant le règlement de l’édition 2023. Les candidatures concernent les documentaires diffusés à la télévision et sur plateformes entre le 1er mars 2022 et le 28 février 2023.

À noter : deux membres du jury 2023 travaillent chez Netflix et Éclair Vanves, ce qui exclut les programmes traduits chez ces clients pour cette édition.

Pour soumettre votre candidature, il vous suffit de remplir ce formulaire en ligne. Vous pourrez joindre les éléments (vidéos et scripts VO et VF) en suivant un lien à la fin du formulaire.

Le formulaire sera actif du 23 janvier au 28 février 2023.

Si vous souhaitez participer, mais que vous avez des difficultés à vous procurer les éléments manquants (la vidéo VF/VOST, notamment), pensez à déposer votre candidature avant la date-butoir : vous pourrez toujours nous envoyer les éléments ensuite.

Alors si vous avez signé une belle traduction cette année, n’hésitez plus : vous avez aimé l’écrire, nous voulons la lire !

En cas de doute sur la validité ou la pertinence d’une candidature, vous pouvez nous écrire à : prix-documentaire@ataa.fr

Interview d’Elsa Vandaele

Mention spéciale du Prix de la traduction de documentaires télévisés
pour Seaspiracy : la pêche en question

Félicitations pour votre distinction pour la voice-over de Seaspiracy ! Pouvez-vous nous parler en détail de ce documentaire qui traite de la surpêche et de son impact sur l’environnement ?

Il s’agit d’un documentaire très dense, fourmillant de chiffres et de données dont le rythme s’accélère progressivement. Le propos traite des déchets plastiques avant de monter en puissance avec la chasse aux dauphins au Japon et l’esclavage de pêcheurs de crevettes sur des bateaux thaïlandais. Il y a même une scène où le réalisateur se fait contrôler par la police. La musique devient palpitante… Et j’avoue que le massacre des requins et la chasse à la baleine aux îles Féroé m’ont donné des haut-le-cœur. En découvrant le contenu, j’ai aussi ressenti une pointe d’angoisse : il s’agissait d’un sujet grave, d’un sujet d’actualité et j’avais l’obligation d’en rendre compte au mieux. Évidemment, c’est le cas pour tous les projets qui nous sont confiés, néanmoins j’ai ressenti une pression supplémentaire. D’autant que ce documentaire avait des chances d’être médiatisé.

Interview de Marie Laroussinie et Christophe Elson

Lauréats du Prix de la traduction de documentaires télévisés 2022
pour Derrière nos écrans de fumée

Bravo pour ce Prix ! D’autant que vous êtes de tout jeunes adaptateurs. Parlez-nous de vos débuts dans le métier.

Marie Laroussinie : En effet, nous sommes en tout début de carrière. Personnellement, j’ai réalisé ma première adaptation fin 2016. Initialement, je m’imaginais devenir prof d’anglais. Mais après quelques heures de tutorat et de cours particuliers, j’ai compris que ce métier n’était pas fait pour moi. La révélation est survenue à l’occasion de mon stage à Dubbing Brothers en Licence 3 LEA. Lors de ma première journée passée en studio, j’ai immédiatement su que c’était là que je voulais être ! Ce stage s’est déroulé au sein de la production télé : je m’occupais de la recherche de voix, du visionnage, de la convocation des comédiens… C’est de cette manière que j’ai découvert le doublage. Cela m’a tout de suite intéressée, mais je ne connaissais rien au métier… J’ai finalement décidé de suivre le Master en traduction audiovisuelle à l’université de Nanterre. En Master 1, Dubbing Brothers m’a proposé un CDD de remplacement pour m’occuper de la préparation technique : envois en détection, envois aux auteurs, conformations, mise en place de bandes… Au quotidien, je travaillais au contact des adaptateurs, et des détecteurs avec qui je me suis formée aux logiciels. J’ai véritablement commencé la traduction durant mon année de Master 2 où on m’a confié des épisodes des Feux de l’amour.

Christophe Elson : En comparaison de Marie, je suis ultra junior dans ce métier. Je me suis lancé dans la traduction audiovisuelle il y a trois ans seulement. Grâce à son aide ! Suite à un désistement, Marie m’a poussé à saisir l’opportunité qui s’offrait à nous de traduire en binôme un épisode des Feux de l’amour. Étant bilingue, j’avais certes les bases de la langue, mais aucune méthode de travail, ni aucune connaissance des logiciels. Marie m’a formé en accéléré. Ce n’était pas toujours facile : elle a été extrêmement exigeante. Avant cela, j’avais ma société de webmarketing ; et précédemment encore, je traduisais des sites Internet. Mon parcours est plutôt atypique. Surtout si on tient compte du fait que je voulais devenir doubleur voix. Malheureusement, je n’avais ni les capacités vocales ni le talent de comédien… Après les Feux de l’amour, on m’a proposé un premier documentaire Netflix sur les incendies en Californie. Ensuite, les projets se sont enchaînés. Aujourd’hui, c’est la consécration avec ce Prix !